Répudier la succession ou l’accepter en cas de dettes ?

De nombreuses personnes laissent non seulement un patrimoine, mais également des dettes à leur décès. Il existe diverses mesures que vous pouvez prendre afin d'obtenir malgré tout l'argent qui vous revient de droit en tant qu'héritier ou héritière.

L’essentiel en bref

  • Si vous êtes héritier ou héritière d’une succession, vous devez vous informer sur la situation financière du défunt ou de la succession.
  • Quels types de dettes y a-t-il dans cette succession ?
  • Réfléchissez à la manière la plus adaptée à votre cas parmi les possibilités mentionnées ci-dessus pour obtenir votre argent.
  • Dans notre centre de téléchargement, vous trouverez des modèles de contrats (p. ex. pacte de renonciation à succession) ou de clauses (p. ex. désignation d’un exécuteur testamentaire).
  • Les autorités impliquées sont l’office des poursuites ou le tribunal d’arrondissement.

Que sont les dettes et quels sont les différents types de dettes ?

Les dettes pécuniaires en général

S’endetter ou avoir des dettes fait partie de la gestion normale et quotidienne d’un ménage et de la planification d’un budget. Nous le faisons tout le temps, parfois sans même y penser. Les exemples vont du paiement par carte de crédit au supermarché à l’hypothèque sur le logement en passant par le paiement échelonné de la nouvelle voiture. En règle générale, il s’agit simplement de pouvoir payer les factures lorsque l’on dispose de suffisamment d’argent et de temps pour le faire. Jusqu’à ce moment-là, le montant reste dû en tant que créance.

Cela ne pose pas de problème tant que le débiteur est en mesure de désintéresser le créancier dans le délai de paiement qui lui est imparti. Si cela ne lui est pas possible, des intérêts moratoires de 5 % par an sont normalement facturés à partir du moment où le débiteur est en retard de paiement. Si le débiteur ne peut pas apporter la preuve qu’il n’est pas responsable du retard, il doit également indemniser le créancier pour tout dommage supplémentaire qu’il a subi de ce fait.

Dettes successorales - que faire ?
Les dettes ne posent pas de problème, à condition que le délai de paiement soit respecté. (Image : iStock)

Dettes en nature et dettes de prestation de service

Bien que, dans l’usage quotidien, on associe surtout les « dettes » aux paiements en espèces, cela ne couvre pas toutes les situations possibles. Au sens juridique, le terme « dette » peut désigner non seulement une dette pécuniaire, mais également une dette en nature ou une dette de prestation de service. Si par exemple un vendeur par correspondance vend sa marchandise contre paiement anticipé, il a une dette en nature. De même, si un avocat reçoit ses honoraires à titre d’acompte, il a une dette de prestation de service. Ces dettes subsistent jusqu’à ce qu’ils aient chacun exécuté leur part du contrat. De tels cas de figure se produisent souvent, mais pas uniquement, dans le cadre d’une activité lucrative (indépendante).

Que se passe-t-il en cas de dettes d’un propriétaire d’entreprise ?

Si une telle activité est exercée sous la forme juridique d’une personne morale, par exemple une SA ou une Sàrl, la liquidation en cas de décès du propriétaire est relativement simple :

Ensuite, les acquéreurs de la société s’occupent de la marche des affaires ou chargent des tiers de le faire.

Cependant, s’il s’agit d’une entreprise individuelle ou d’une société de personnes (société simple, société en nom collectif ou société en commandite), elle est dissoute au décès du directeur ou de l’un des associés. Le contrat de société peut déroger à cette règle et prévoir la poursuite de la société avec les héritiers. Dans le cas contraire, le patrimoine du défunt placé dans la société est liquidé. Les créances ouvertes sont alors encaissées et les dettes réglées. Un éventuel excédent de liquidation est versé à l’actif successoral et réparti. S’il reste un découvert à la fin, les héritiers en répondent sur leurs propres biens.

Hériter de dettes – Répudier la succession

Les dettes du défunt disparaissent-elles à son décès ?

Si le débiteur est dans une mauvaise situation financière ou en mauvaise santé ou si, pour une autre raison, il ne parvient pas à s’acquitter de ses dettes avant son décès, celles-ci ne disparaissent pas automatiquement pour autant. Seules les dettes strictement personnelles, telles que celles qui découlent de l’entretien de la famille ou de l’entretien après divorce, s’éteignent au décès du débiteur. Cependant, en règle générale, il devient plus compliqué pour les créanciers d’obtenir la prestation qui leur est due.

La somme des actifs et des passifs du défunt (c’est-à-dire ses biens et ses dettes) est transmise en intégralité à la communauté de ses héritiers. L’héritier ou la communauté de plusieurs héritiers succède ainsi au défunt. Est héritier celui qui participe à la succession de par la loi ou par disposition pour cause de mort (testament ou pacte successoral positif). En principe, les créanciers ne font pas partie de la communauté héréditaire.

En cas de dettes d’un héritier

Une succession n’a en principe aucune influence sur les dettes des héritiers envers des tiers et inversement ; celles-ci ne regardent qu’eux. Toutefois, si un héritier est insolvable et qu’il n’a pas été exhérédé de manière préventive, ses créanciers peuvent, dans certaines circonstances, saisir sa part à la succession, cela même si l’héritier concerné veut répudier la succession. Si, dans la faillite, il n’introduit pas l’action en réduction pour violation de sa réserve héréditaire, l’administration de la faillite ou ses créanciers peuvent le faire à sa place.

De quelles possibilités disposent les créanciers pour récupérer leur argent ?

Les dettes du défunt (également appelées dettes successorales ; celles qui existaient déjà avant l’ouverture de la succession) et les dettes de la succession (obligations qui naissent en relation avec la succession, p. ex. les frais funéraires ou les honoraires d’avocat) sont d’abord payées par l’actif successoral. Dans le cadre du calcul de la quotité disponible, elles sont déduites au préalable. Dans un premier temps, on essaiera d’éteindre le plus tôt possible toutes les dettes au moyen de l’actif successoral. Cela permet d’éviter ou du moins de réduire l’apparition d’intérêts moratoires ou de dommages et intérêts coûteux et épargne à toutes les parties concernées une procédure de poursuite complexe et coûteuse. Afin de réunir des liquidités, il peut être nécessaire de vendre des biens successoraux ou de les céder aux créanciers en compensation de leur créance, notamment si les liquidités disponibles ne suffisent pas. La communauté héréditaire doit en principe prendre une telle décision à l’unanimité, à moins qu’un exécuteur testamentaire, un administrateur de la succession ou un représentant des héritiers n’y soit autorisé.

Comme mentionné ci-dessus, les héritiers acquièrent la succession en commun et dans son intégralité. Ils répondent ainsi en commun des dettes de la succession vis-à-vis des tiers, et ce même jusqu’à cinq ans après l’échéance ou la clôture du partage successoral. Cela signifie que chaque créancier peut exiger de chacun des héritiers le paiement de l’intégralité de sa créance dès que celle-ci est exigible. Chaque héritier répond non seulement sur sa part successorale, mais aussi sur sa fortune privée si la première ne suffit pas. Les héritiers ont un droit de recours les uns contre les autres et peuvent ainsi s’indemniser à l’interne. A défaut de paiement, les créanciers sont libres d’engager une procédure de poursuite pour les dettes pécuniaires. Pour les prestations en nature et les prestations de service, ils devraient agir en justice pour obtenir l’exécution. Dans tous les cas, les prétentions des créanciers héréditaires doivent être satisfaites avant celles des légataires.

La poursuite des dettes pécuniaires

Tout d’abord, un point fondamental quant à la procédure de poursuite : si une créance exigible demeure impayée, le créancier peut poursuivre le débiteur à tout moment auprès de l’Office des poursuites du domicile du débiteur. L’Office des poursuites enverra alors un commandement de payer au débiteur. S’il paie ensuite, la poursuite devient sans objet et caduque. S’il fait opposition ou refuse de payer, le créancier doit généralement faire valoir sa prétention dans le cadre d’une procédure civile ordinaire. Dans le cadre de celle-ci, le créancier lèvera l’opposition au moyen d’un jugement exécutoire et continuera la poursuite.

Il s’ensuit la saisie, la réalisation du gage, s’il existe un droit de gage, ou la faillite du débiteur, afin de régler les créances des créanciers au moyen de ses actifs liquides. Si les actifs disponibles ne suffisent pas, les créanciers reçoivent des actes de défaut de biens pour leurs créances non couvertes. Ces actes de défaut de biens valent reconnaissance de dette et les autorisent à continuer la poursuite ultérieurement.

Les créanciers doivent toutefois patienter un peu avant d’engager des poursuites immédiatement après le décès du débiteur. Outre le fait que la décence l’impose, la poursuite est suspendue pendant au moins deux semaines, voire davantage, pendant le délai de réflexion des héritiers.

La succession peut être poursuivie avant la clôture de la succession là où cela aurait été possible contre le défunt avant son décès. Le commandement de payer est alors notifié à un représentant des héritiers ou, si aucun représentant n’a été désigné, à l’un des héritiers.

Si une créance exigible demeure impayée, le créancier peut poursuivre le débiteur à tout moment auprès de l’Office des poursuites du domicile du débiteur. (Image : iStock)

L’action en exécution d’une prestation pour les dettes en nature et les dettes de prestation de service

Comme nous l’avons mentionné, toutes les dettes ne sont pas nécessairement une somme d’argent. Par exemple, on peut imaginer que le défunt ait conclu un contrat de vente avant son décès pour aliéner sa vieille voiture ou qu’il se soit engagé à réaliser une expertise pour un client (contrat d’entreprise ou de mandat, selon les cas). S’il ne lui a pas été possible de fournir la prestation due, le cocontractant conserve un droit à l’exécution, qu’il peut faire valoir dans le cadre d’une procédure civile par le biais d’une action en exécution d’une prestation.

L’action n’est toutefois possible et utile qu’à condition que les droits ne se soient pas éteints avec le décès du défunt et que les héritiers, en tant qu’ayants droit de ce dernier, ne fournissent pas la prestation due de leur propre chef. Le droit s’éteint normalement en raison d’une impossibilité objective lorsque le contrat a été conclu principalement en raison de la personne du défunt (p. ex. parce qu’il disposait d’une expertise particulière dans un domaine spécialisé ou qu’il était créatif). Dans les autres cas, le droit subsiste et les héritiers reprennent la dette en acquérant la succession.

L’action est dirigée contre les héritiers qui ont repris la dette en question. Il est toujours possible d’intenter une action en justice au domicile du défendeur.

Comment les héritiers peuvent-ils se prémunir ?

Cependant, comme les héritiers ne sont pas à l’origine des dettes dont ils héritent, ils ne doivent pas en répondre dans tous les cas. Ils peuvent utiliser différents moyens pour se protéger contre le risque d’hériter de dettes, notamment en répudiant la succession.

La mesure de protection la plus fondamentale contre les dettes successorales est de ne pas participer du tout à la succession. Celui qui a valablement renoncé à son héritage du vivant du défunt ou celui qui répudie la succession après l’ouverture de la succession, par exemple, n’obtient pas le statut d’héritier. Les personnes valablement exhérédées ou indignes de succéder ne font pas non plus partie du cercle des héritiers.

Cependant, une renonciation à succession ne protège que dans une mesure limitée contre les prétentions des créanciers : si la renonciation a été faite à titre onéreux et que le défunt était insolvable au moment de l’ouverture de la succession (soit au moment de son décès), les créanciers peuvent encore saisir pendant cinq ans les éventuelles prestations que les renonçants ont reçues en contrepartie. Il s’agit ainsi d’éviter que la responsabilité des héritiers ne soit éludée.

Les dettes successorales sont un sujet complexe, car elles relèvent de dispositions de différents domaines du droit. Le législateur souhaite, d’une part, permettre aux créanciers de faire valoir leur droit aux prestations qui leur sont dues et, d’autre part, donner aux héritiers la possibilité de se prémunir, puisqu’ils ne sont pas à l’origine des dettes. La manière dont les créanciers doivent procéder pour faire valoir leurs créances dépend du fondement et de la nature de celles-ci (créances pécuniaires selon la LP, prestations en nature et prestations de service selon le CPC). Les héritiers peuvent se protéger de la responsabilité sur leur part successorale et leur patrimoine privé en faisant dresser un inventaire public et en décidant sur cette base s’ils souhaitent répudier la succession, l’accepter ou la faire liquider d’office.

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